Je l’aime bien
Je l’aime bien, ce tendre révolté, ce toujours engagé, ce plus qu’insoumis, vif écorché.
Il me fait rire, il me fait pleurer. Il me fait chanter et me donne l’envie d’écrire.
Je l’aime bien cet amoureux des mots sous une coquille d’argot et de mots même pas gros.
Il me plait assez en loubard reconverti, ce blouson même plus si noir.
Il me fait vibrer ce déprimé repenti, ce dépendant en expiation.
Je l’adore en nostalgique à ses heures lutter par les mots contre ses mélancolies.
Je le préfère tout de même en mec qui a retrouvé le bonheur et qui reprend ses anciennes armes à peine moins redoutables, juste adoucies par les années.
Je l’adore en écrivain intimiste et si vrai. Je le vénère en interprète de son bonheur et de toutes ses joies.
Poète au grand cœur, troubadour rêveur, utopiste obstiné.
Je l’aime assez fou de Brassens, amoureux même ! Un fou de mots et de pêche à la ligne. Un paradoxe cinquantenaire qui se noie dans ses contradictions, mais à la plume si saisissante que tout lui est pardonné.
Un mauvais gars devenu sage. Une mauvaise fréquentation devenue maître.
Un voix pourrie si identifiable. Un cœur qui bat à la chamade.
Je l’aime bien.
Ça n’a pas toujours été le cas. J’ai appris à l’aimer. Je lui trouvais avant des défauts. Je le trouvais vulgaire et ordinaire et insignifiant et teigneux.
J’avais sans doute pas pris la peine de bien l’écouter. J’avais certainement pas pris soin de creuser. Je jugeais sa façade acariâtre. J’avais pas pris la peine d’entrer.
J’y ai pris goût petit à petit. Je me suis imprégnée de lui à l’heure ou il s’est déserté. A son retour, je l’attendais. Je l’espérais renaître et recommencer.
A bras ouverts j’ai accueilli son réveil. A cœur accessible j’ai reçu ses mots nouveaux, son style fidèle et pourtant remodelé.
Depuis c’est moi qui me suis endormie. Je sommeille sur ses mots. Je somnole sur son œuvre. Je ferme les yeux sur ses défauts. Je ronfle pour faire taire la critique parfois si ardente…
Sous le charme, je suis tombée. Ça fait déjà quelques années. A défaut de me soigner, je m’abandonne et en redemande.
J’arrive même à le trouver beau.
Je me surprend à trouver à sa tronche un charme envoûtant. On le dit vieilli, bouffi, cerné… et moi je ne l’ai jamais trouvé aussi séduisant.
Sûrement que je fais l’amalgame entre mes ressentis.
Mais… au fait… c’est qui ?????