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Val ...
21 octobre 2008

Inutilité de la « chose »


Les heures passent inexorablement.

Je peux, au bruit, deviner l’emploi du temps de mes voisins, grâce aux allers et venues des automobiles. Je sais reconnaître les heures de pointe grâce au trafic qui s efait plus dense dans ma rue. Je sais l’heure du lever quand le réveil sonne. Je sais l’heure de l’école par obligation (la seule de la journée). Je sais l’heure du déjeuner par habitude, je sais l’heure de la sieste par la fatigue que je lis dans les yeux de ma fille. Et j’attend l’heure du retour du mari. Ah, ça, je sais l’heure de la solitude ! Elle est longue, cette heure là.

Je ne vis le défilé des heures que par procuration. Je subis le temps. Je m’y laisse entraîner comme dans un courant faible et mou. Je suis passive et immobile, et monotone, comme le sont mes heures. Indifférente et insensible aux minutes qui passent.

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Les jours coulent inéluctablement. Je sais le lundi parce que je suis à nouveau seule. Je sais le mercredi parce que Gabriel est là. Je sais le vendredi parce que son père me libère de « l’heure des mamans ». Je sais le week end parce qu’il est là.

Mais, à part ça, que sais-je des jours ? Est-ce que j’en attend quelque chose, de cet éboulement de jours?

« Bientôt les vacances », me dis-je. Qu’est ce que ça me changera, concrètement ? Les vacances de mon fils changeront une chose : elles me feront oublier l’heure de l’école. J’aurais, pendant dix jours, encore moins de lucidité sur les heures qui passent.

Je ne vis le passage des jours qu’au travers de ce qu’il changera pour les autres.

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Les mois s’évanouissent. L’année s’achèvera bientôt. C’est immanquable. La nouvelle année fait mille promesses à mon mari. A moi, elle me ferait celle de l’invariable, si je ne me réjouissait pas pour lui. Les mois qui s’envolent ne me laissent ni regret, ni consolation. Un de plus, un de moins… ils sont tous égaux. Seules les températures changent.

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Les années aussi, sont mangées petit à petit. Mais dans quel but ? Celui de voir grandir mes petits, celui de leurs évolutions. Progrès par procuration. Celui de voir mon mari évoluer professionnellement ? Avancement par procuration.

Celui de me voir prendre un an ? Comme je m’en fiche ! Je pourrais avoir vingt trois ans. Je pourrais bien en avoir vingt cinq, trente, trente trois, trois huit.. Qu’est ce qui serait différent ?

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On pourrait être n’importe quel jour, de n’importe quel mois, de n’importe quelle année, que rien ne serait différent, si ce n’est le regard que je porte sur eux. Certes, un regard fier, satisfait, amusé, complice…

Rien ne serait différent quant au regard que je porterais sur moi. Il est immuable.

Pas de changements. Aucune métamorphose. Pas de but atteint, pas de projet en cours, pas d’horizon nouveau qui se profile au loin.

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Les heures défilent, les jours avancent, les mois passent, les années se meurent, et ma seule légitimité à exister est de les aider à avancer.

Je les sers, les soutiens, les assiste, les protège, les épaule, en toute immobilité.

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Les attentes qui me sont propres sont des leurres. Je ne guette le temps qui passe que pour prévoir leurs joies futures.

Mes évasions ne sont qu’illusions. La lecture, l’écriture, les sorties, ne sont prisées que pour me faire oublier un peu plus le temps qui passe sans que je n’en fasse quoi que se soit qui ait le moindre intérêt, et le temps qui a passé, depuis que je n’ai rien fait. Tout ce temps bourré de mon inutilité…

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Je suis nulle. Pas de cette nullité dont on s’insulte, fâchée, quand on vient d’échouer dans ce qu’on entreprend. Moi, je ne risque pas un échec, je n’entreprends rien. Je suis nulle dans le sens mathématique du terme, égale à zéro.

Et encore, même dans ce rien il m’arrive parfois d’échouer.

Et encore, quand on fait rien pour être un peu au dessus du zéro, c’est peut-être même qu’on est en dessous déjà.

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Si encore j’étais parfaite dans cette inutilité ! Si encore j’étais de celles qui s’oublient pour leurs proches par tempérament, là serait ma vertu. J’aurais cette foi inébranlable de celles qui sont certaines de faire ce qu’elles croient juste.

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Moi, je suis confuse, tout comme l’est l’influence qu’a le temps sur moi. Mais le pire, dans tout ça, c'est de se dire que personne d'autre que moi n'est responsable de mon inutilité.

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Commentaires
C
Vivre sans montre ? Le rêve ! Profite...<br /> <br /> La "chose" ? "Inutile" ? Il faut avoir un travail pour être utile ? <br /> <br /> Le temps passe sans que tu t'en rendes comptes ? Cela signifie tout simplement que tu es heureuse. Le temps a la fâcheuse tendance de ne s'étirer et se faire sentir que lorsque l'on s'ennuie ou que l'on souffre...
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L
Inutile ?<br /> Mais qui d'autre que toi pourrait embrasser tes enfants ? Qui d'autre pour donner un sourire à Manu ? Qui pour écrire aussi bien et rendre le sourire à toute la blogosphère quand on vient chez toi ?
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V
Oh, Lulu, oui, ok! Il me semblait bien...<br /> Manu bosse là bas.
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L
Juste à côté, en effet, une quarantaine de kilomètres au nord, dans la ville aux deux tours ;-)<br /> Et comme partout ailleurs dans ce pays, dans la majorité des cas, ce sont les diplômes qui priment et non pas l'expérience, contrairement à ce que l'on pense ou dit.<br /> Mais bon, j'ai adopté depuis longtems le système débrouille, et ça marche pas trop mal. ;-)<br /> <br /> Bisous Val.
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V
Teb, pourquoi je l'effacerais? Il est bourré de choses gentilles, ton commentaire. <br /> <br /> Bly Marie, j'ai essayé.. et je tombe sur...l'horloge parlante! <br /> <br /> Lulu, merci de ton commentaire. Le marché du travail, oh oui, je comprends... D'ailleurs, il me semble que tu ne vis pas très loin de chez moi, non?
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