Chers internautes, bonjour,
Vous ne me connaissez pas, alors que je sais tout de vous. Tout ! Enfin, tout ce que Val sait, je le sais.
Inséparables, nous sommes. Inséparables, indissociables, consubstantielles, siamoises.
Non, non, je ne suis pas qui vous croyez. Ne cherchez pas une créature de sang et d’os, ni un fantasme ni un ectoplasme.
Que
vous suiviez le blog depuis sa naissance ou que vous ayez pris le
convoi en route, vous n’aurez pas manqué de lire la dévotion que Val
porte au café. Breuvage qui coule dans ses veines, n’a-t-elle pas
écrit, sinon vingt fois alors cent.
En revanche ((comme on dit,
le samedi matin, sur le marché de Rémalard (Orne)), comme j’ouvre une
parenthèse, j’en profite, Val m’a dit votre amour pour les sciences
mathématiques. L’Orne 61, le département qu’elle chérit le plus après
le 17. Aviez-vous constaté que si on inversait les deux chiffres qui
composent le 61 on n’obtenait pas le numéro du département de la
Charente-Maritime. Étonnant, non ? (Val m’a demandé de ne pas faire
trop compliqué. C’est bon ainsi ?))
Mais je digresse, je digresse : “Graisse” et je vous perds. Je reprends :
En
revanche, je ne sache pas (oui, je parle parfois comme le vieux
Papistache, c’est que j’ai lu tous ses billets, certains, dix fois)
qu’elle (Val) vous ait jamais entretenu de moi. Je ne vois même pas
pourquoi je pose la question puisque je sais qu’elle ne vous a jamais
parlé de moi. C’est que notre relation est de l’ordre de l’intime.
Je
vous allèche et vous fais saliver. Siamoise, intime, café. Qui suis-je
? Comme Val, je ne résiste pas et vous donne et la réponse et la
devinette dans le même paragraphe.
L’aube se lève, Val dort
encore. Elle m’a quitté si tard. L’aurore lui succède, elle dort
toujours. Elle m’a quitté si tard. Enfin, la voilà. Je suis de sa
première attention. Je me love au creux de sa main. Sans moi, elle
laperait son café comme le chien son eau fraîche. Sa tasse. Que dis-je
sa tasse ? SA tasse.
Oh ! Je sais que mon rôle a toujours été tu. “J’adore le café, je bois du café, je me sers un café, je reprendrais bien un petit café...”
jamais un mot pour moi, jamais une parole reconnaissante, jamais un
hymne, une ligne, une allusion... n’empêche, au creux de sa main,
j’approche ses lèvres moi, messieurs, madame. Je garde longtemps en ma
porcelaine, la chaleur ôtée au liquide brûlant et la lui restitue
doucement, doucement. Je capture les arômes corsés que Val hume,
longtemps après que le nectar a irrigué son système sanguin.
Val,
l’air absent, me serre entre ses deux mains et nos fluides communiquent
; je réchauffe ses doigts gourds, je suis SA tasse. Elle aime sentir
ces dernières calories que je retiens pour elle. Voyez si elle ne
m’approche pas de sa joue pour que nous échangions encore.
Communion
laïque qui se renouvèle à toute heure ; comme jadis les moines se
rendaient aux offices, Val reproduit les mêmes gestes. Je n’exagère pas
en disant qu’elle prie, ses mains jointes autour de mon galbe
rassurant, elle prie. Elle prie et je la réchauffe. Si le café est le
sang de son christ, je suis son ciboire, son Graal.
Dix messes
par jour, dix communions, dix fois dix élévations jusqu’à ses lèvres,
je suis faite à ses paumes. Je sais qu’elle lorgne sur les gobelets
géants des acteurs des séries américaines, récipients monstrueux aussi
impersonnels que le jus qu’ils contiennent, je ne suis pas jalouse,
c’est moi qu’elle porte à sa bouche en guignant ces confrères pansus,
moi qui porte à son palais (je suis l’intendante de son Palais) son
élixir de vie.
Elle peut quitter la maison, être invitée, commettre quelques infidélités, elle revient... toujours.
Le
temps ne me paraît pas long. J’entretiens une fidèle amitié avec une
autre obscure inconnue qui n‘a guère, elle non plus, les honneurs des
écrits de notre belle maîtresse. Nous devisons des heures durant quand
Val s’absente. Nous parlons d’elle bien sûr. Je lui raconte nos
frôlements, ses doigts enlacés, ses lèvres qui suppent sa sève
nourricière, sa joue qui cherche les ultimes atomes de chaleur, son
pouce qui masse mes rondeurs lisses ; elle me dit le rituel,
qu’infaillible, elle préside. Je le sais, c’est moi qui recueille le
précieux nectar qui sourd de ses orifices tout à cet art soumis. Entre
la cafetière et moi, l’osmose est parfaite.
Manu ne rappelle-t-il pas souvent ce credo ? “Si le bateau coulait : Ma femme, mes enfants, la cafetière et la tasse d’abord !”
Bon
anniversaire Val ! C’est inutile que je le lui claironne. Je suis de
toutes ses cérémonies. Elle va verser des larmes de joie à lire tous
vos témoignages d’amitié mais c’est sur moi qu’elles vont couler et ce
ne seront ni les premières ni les dernières.
La tasse à Val