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Val ...
22 avril 2020

Une femme desendoctrinée

Que serait donc la femme à qui on n’aurait jamais inculqué de morale, de bienséance, que l’on n’aurait pas dénaturée dès l’enfance de clichés et d’histoires d’amour romantiques? Que serait cette femme que l’on aurait pas protégée mal à propos, lui faisant croire que sa vie durant, elle aurait grand besoin de protection, étant femme ? Que serait-elle sans l’exemple dominant  de la mère, de la femme domestique qui apporte au foyer, et dont l’unique fierté est le bon ordre et le bonheur apparent de la famille qu’elle a construit? Que serait cette femme enfin, si on ne lui avait pas rabâché comme une femme doit préserver sa réputation, respecter son corps, ne pas « se donner » à l’homme, si la morale n’avait pas dénaturé toute sexualité, c’est à dire si on ne lui avait pas représenté la sexualité comme un acte sacré et réservé ? 

Cette femme, logiquement, et dès le plus jeune âge, saurait s’extirper de toutes les poses et simagrée apprises, et qui ne servent qu’à séduire et attirer l’homme à elle. Quel besoin aurait-elle de s’encombrer d’un partenaire tandis qu’elle se saurait encore inaboutie ? Elle aurait conscience qu’une attache prématurée freine toute ascension. 

Tout comme elle aurait très vite appris à ne compter que sur elle-même, que sur son propre savoir, comme elle aurait veillé à s’assurer de son travail régulier et à améliorer sans cesse ses capacités individuelles pour assurer sa propre subsistance. Elle se serait bâti sa propre discipline, loin des feintes et des comédies qu’elle joue malgré elle. 

Ainsi, cette femme saurait atteindre l’autonomie financière et en serait fière. Et elle mépriserait logiquement celles qui jouiraient de biens acquis par d’autres qu’elles, c’est à dire de façon non méritée, les autres fussent-ils leurs maris. Car, raisonnable, elle aurait conscience de sa propre valeur, et se sentirait diminuée d’avoir besoin de l’homme protecteur. 

Elle avancerait seule sur le chemin de la raison et, tout à fait détachée des devoirs du foyer, elle s’élèverait pour elle-même avant même de songer à s’embarrasser d’un engagement amoureux, devenu secondaire puisque n’apportant plus le confort. 

Ainsi, on compterait plus de femmes, probablement, dans les arts, dans la vie publique, en politique et dans les sciences.  La femme n’est pas moins brillante intellectuellement que l’homme. Et je ne pense pas que l’homme l’écrase, autant qu’on le prétend, d’une volonté de la maintenir inférieure à lui. C’est la femme elle-même bien souvent qui privilégie la sérénité d’une « vie privée heureuse », concentrant tous ses efforts et tout son temps sur la bonne entente de son mariage, sur l’éducation et le bonheur de ses enfants, sur la propreté de sa maison ainsi que sur toutes ces chimères dont on lui a rabattu les oreilles et vendues comme autant de buts et de sens à sa médiocre vie, mais qui ne sont que des entraves à son élévation personnelle. 

Cette femme serait perçue comme une égoïste, mais seulement si elle était seule à le faire. En nombre, comme une nouvelle norme, elles seraient des modèles et les femmes domestiques et protégées se sentiraient honteuses et se mépriseraient  de ne point les égaler, de rester si inférieures, et de recourir au besoin d’un tiers pour leur apporter ce qu’elles auraient pu trouver par elles-mêmes. 

Que l’on ne s’y trompe pas: ce que revendique le féminisme au sens où nous l’entendons aujourd’hui, est très éloigné de ce que serait la femme desendoctrinee. Cette femme se ficherait de parité, la refuserait même, tout comme elle refuserait une égalité homme/femme de salaires et de droits de manière légiféree. C’est qu’elle ne souffrirait d’être considérée par la société comme un individu, là encore, à protéger, et donc reconnu comme inférieur. La femme desendoctrinee obtiendrait la reconnaissance uniquement par son talent, par son travail, par la preuve de ses capacités. Autrement, toute promotion ne vaudrait rien pour elle et elle se mépriserait d’accéder à un poste pour lequel elle se saurait sous-qualifiée. 

Ainsi délivrée de sa position d’individu « fragile », qu’elle entretient pour son confort,  la femme atteindrait enfin sa propre nature, qui lui est tout à fait inconnue. Certes plus vulnérable physiquement, elle apprendrait à se protéger elle-même des éventuelles agressions physiques ou violences sexuelles. Hey quoi? Une arme ne peut-elle pas rétablir un déséquilibre de force physique et tenir en respect ? Et bien plus efficacement qu’un tribunal ou que des lois en faveurs des plus faibles? 

La femme desendoctrinée et élevée par et pour elle-même n’aurait nul besoin de castrer l’homme, de le féminiser, de le vouloir domestique. Pour la bonne raison qu’elle-même n’aurait plus besoin de se dénaturer ni d’utiliser l’homme pour s’assurer un confort de vie et une protection financière et physique. 

Elle aurait conscience que l’égalité homme femme est absurde et innateignable, ainsi que toute sorte d’égalité factice et fabriquée par des lois en faveur de ceux qui se posent en faibles. 

L’ascension sociale, tout comme le respect, devant être mérités par chaque individu et n’être que récompenses de leurs mérites propres, sans distinction de sexe. 

Sa libération de toute doctrine n’exclurait pas l’amour pour autant. Je prétends même que c’est l’inverse. Cette femme qui n’aurait plus besoin de protecteur, de prince charmant ni de bon père de famille redonnerait un vrai sens à l’amour. Détachée de tout besoin matériel et de tout désir de protection, elle élirait mieux, c’est à dire sur des critères objectifs et rationnels. Cette femme aimerait l’homme au mérite. Plutôt que de choisir le plus tendre, le plus fort, le plus riche ou le plus protecteur, elle choisirait le plus prompt à accélérer son ascension. Son choix se tournerait vers l’homme qui se serait, lui aussi, détaché de toute morale et qui aurait su s’élever. Son seul critère serait donc l’admiration. 

Elle ne ferait aucune promesse intenable ni ne signerait aucun contrat avec cet homme aimé, se gardant ainsi la possibilité de se défaire de cette union à tout moment. Soit parce qu’elle se laisserait la possibilité d’évoluer, soit parce que l’homme aurait déchu, ou bien parce que tout simplement, un homme encore plus admirable pourrait à tout moment supplanter le premier. 

Ce ne serait ni injuste ni cruel dans la mesure où l’homme aurait les mêmes droits, et que l’un et l’autre s’efforceraient continuellement de mériter la personne aimée, de se montrer digne toujours de cet amour sans se relâcher. Ce serait très sain je trouve, plein de vigueur, d’éclat dans la performance, comme une sorte de défi permanent, comme une reconquête et une séduction quasi quotidienne de l’autre, le surprenant par de nouveaux efforts accomplis, par de nouvelles étapes intellectuelles franchies. Quoi de plus stimulant? 

Ainsi, la fidélité non plus ne serait pas une promesse contractuelle. Ce serait à chacun de se rendre méritant de cette fidélité, en veillant à ne pas déchoir, en restant digne de l’admiration - et donc de l’amour - de l’autre, ainsi qu’en continuant de consentir avec joie à l’entretien d’une sexualité riche et épanouie. 

Dans sa sexualité, la femme desendoctrinée laisserait libre court à des élans non bridés par la morale ou les lieux communs appris. Elle ne viserait que son propre épanouissement physique. Sans qu’on lui ait inculqué la moindre idée visant à dénaturer la sexualité, elle s’abandonnerait à ce que lui dicte son instinct de femme et irait là où ses désirs la conduisent, débarrassée de craintes bienséantes et de ce que « doit » être la sexualité selon une norme établie par les contes et les proverbes. Ainsi, elle se ficherait bien d’être femme objet ou femme humiliée ou femme soumise dans l’intimité, si tels sont ses penchants. Et elle ne verrait aucun obstacle à ce que l’homme déploie toute l’étendue de  sa virilité et affiche une grande puissance dans la sexualité. 

Elle ne regarderait plus les supports pornographiques avec un dégoût et une indignation affectés sur la manière dont y sont considérées les femmes , mais avec une curiosité qui lui permettrait d’enrichir sa propre sexualité. Elle ne feindrait plus de plaindre ces femmes et admettrait logiquement qu’elles s’épanouissent ainsi. Car enfin, il faut admettre une chose: tant que la diffusion de la pornographie était réservée aux acteurs et producteurs professionnels, il était aisé d’imaginer que ces femmes soumises et humiliées était contraintes. Mais à présent que la pornographie s’est généralisée et popularisée, que nombre de couples amateurs publient leurs vidéos intimes, il faut bien admettre que ces femmes consentantes et non rémunérées ne font pas autre chose - ou si peu - que de s’épanouir dans une domination mâle. 

Devenir mère ne serait pas une finalité ni un accomplissement pour la femme desendoctrinée . Et encore moins un piètre moyen de retenir l’homme ni de le modeler et le manipuler de sorte qu’il devienne un « père de famille responsable ». D’ailleurs, elle ne voudrait plus alors de cet homme tout à fait corvéable. Soumis, domestiqué, il ne serait plus alors digne d’admiration pour elle. 

L’enfant ne lui serait pas non plus un moyen de se sentir une valeur dans sa condition de mère de famille. Faire un enfant serait un haut degré d’accomplissement. Dans le sens où la femme, se sentant élevée et irréprochable dans sa condition d’individu, se donnerait un nouveau défi et se sentirait en grande capacité d’assumer cette considérable responsabilité, qui serait d’élever un individu de manière à ce qu’un jour, il puisse la dépasser. 

Jamais elle ne considérerait la maternité comme un droit inaliénable, ni même comme un besoin vital où une nécessité à son épanouissement. L’enfant au contraire serait une charge lourde, dont elle aurait mesuré les contraintes en amont, afin d’être certaine de parvenir à élever un individu de la meilleure manière qui soit, c’est à dire en s’assurant de développer en lui un maximum de ses capacités et de le faire devenir, lui aussi, un individu élevé et libre de tout dogme. 

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Commentaires
A
Il me semblait justement que tu parlais d'élever seule un enfant, dans un autre texte.<br /> <br /> Ton aveu était prévisible : cela se "sent" dans ton texte ! <br /> <br /> <br /> <br /> La discrétion légendaire de cette femme !! Le seul moyen de développer notre communauté, c'est de cacher l'identité de ses membres, et surtout la tienne !
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A
Je commente ton texte à la suite de celui de Henry War, puisque celui-ci est une forme de réponse au premier, un genre de "version féminine". <br /> <br /> <br /> <br /> Une énumération qui se veut exhaustive et qui répond précisément à chacun des aspects de l'existence d'une femme : c'est clairement exposé, quoique sans panache, et ton sérieux finira par intimider tes derniers lecteurs ! (Sourire) Il n'y que l'enfantement qui me laisse dubitative : comment envisager élever un enfant seule ?<br /> <br /> <br /> <br /> (Ta promptitude à relever un défi est franchement réjouissante, je trouve : j'aime que notre drôle de communauté soit animée d'impulsions et de mouvements !)
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C
Globalement d'accord, à part sur ta phrase " certes plus vulnérable que l'homme physiquement". Encore une idée reçue qui a la vie dure... démentie d'ailleurs par l'espérance de vie.<br /> <br /> A lire (si cela t'intéresse) les travaux de Françoise Héritier sur la façon dont on a conditionné depuis la préhistoire les femmes y compris physiquement, pour bâtir un système de pensée machiste.<br /> <br /> Bises <br /> <br /> •.¸¸.•*`*•.¸¸☆
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V
Bon, bon, je supprime. <br /> <br /> <br /> <br /> Merci. <br /> <br /> Il ne blessera personne, chacune se croyant différente et n’obéissant qu’à ses propres souhaits, personne n’admettant jamais obéir à des doctrines ancrées.
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H
(Supprime la dernière phrase, inutile.) Excellent manifeste de la féminité amorale, sorte de consécration d'un affranchissement véritable de tous les préjugés sociaux. Un texte à arborer comme un placard, et qui blessera intimement la posture de beaucoup. Félicitations.
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