Laisse parler les gens
Ils sont partis. Comme ça, rapidement. Sur un coup de tête ? Certainement pas... le départ a dû être préparé de longue date. Calculé, pensé, réfléchi, affiné.
Ils sont parti pendant les vacances de Pâques. Ils ont juste demandé les certificats dans les écoles des enfants, sans dire où ils allaient. Les gamins non plus n'ont rien lâché. A personne !
Ils avaient mis leur maison à louer. Discrètement. Sans bruit. Sans notaire. Sans publicité. Sans profit. Le loyer paie leur crédit immobilier.Point. L'urgence était ailleurs: partir.
Et ils sont partis.
Où ça ? Personne ne le sait.
Alors les gens parlent. Ils parlent beaucoup. Ils ne parlent que de ça. Le départ... rapide.
Ils sont à Toulouse, à Montpellier, dans les Alpes.
D'autres les ont vus à 20 km d'ici.
Il paraît même qu'ils seraient séparés.
Les locataires sont sans cesse questionnés. Eux, ils doivent bien savoir. Faut bien payer le loyer, tout ça.
Bah non. Ils ne savent pas. Ils ne savent rien.
Ils ont un numéro de compte pour virer les loyers. Facile. Simple. Discret.
Une quittance arrive chaque mois par courriel. Un échange s'ensuit. Simple, bref, cordial.
Est-ce que tout va bien ? Les plantes sont en fleurs. On a repeint le couloir.
C'est histoire de discuter.
Car...
Ils ont quartier libre de toutes façons.
Car...
Ils ne reviendront pas...
Et en cas d'urgence ?
Un numéro de portable. Simplement pour les vraies urgences. Un incendie, pas moins.
Un seul mot d'ordre: ne donner l'adresse courrielle et le numero de portable à strictement personne.
C'est quand même fou ! Les locataires mentent. Ils sont dans la confidence mais tiennent bon.
Eh bien non. Ils ne savent pas et en sont très heureux. C'est plus facile que de devoir mentir, ou risquer qu'une information ne leur échappe.
En tous cas, ça a le mérite de faire parler les gens. C'est même devenu une affaire d'état (à l’échelle du village, disons).
Dans les petits villages, on parle plus de ces départs mystérieux que des manifs contre le mariage pour tous.