Challenge
Le déclic a surgi un jour, comme ça, à l’improviste. Il m’a prise au dépourvu. Bien sûr, j’y songeais parfois, depuis des années, mais sans prendre ce genre de fantaisie au sérieux. J’en rêvais comme on rêve de refaire le monde. Ce n’est ni envisageable ni réfléchi, mais ça fait du bien d’en rêver. Je clôturais chaque fois ma rêverie par cette pensée que ça occuperait certainement mes vieux jours, si j’en ai …
Un après midi, en conduisant, j’y pensais. Je ne sais comment, l’utopie est devenue palpable un peu malgré moi. Et si c’était accessible, finalement ? . Et si il suffisait simplement d’en avoir envie, et de se lever un matin en disant « Aujourd’hui, j’attaque ! ». Et si c’était simple comme « bonjour » ? Et si c’était aussi facile que de traduire par des mots tout mon monde imaginaire ?
Ça l’était. Cet après midi là, je me suis aperçue que ça l’était. C’était d’une aisance enfantine. C’était à la porté de la première venue. C’était à ma portée. Il suffisait juste, pour cela, d’accepter de raccourcir ses nuits, ou alors de chiper un peu de temps à la lecture. Il suffisait simplement de ne pas être trop exigeante , ni pointilleuse, ni trop sévère envers moi-même. Il suffisait de se laisser aller. Il suffisait de faire comme je fais chaque jour : du simple, du léger, du facile, du coulant. Il suffisait de ne pas viser l’excellence et de se contenter du frugal, de ce que je sais manier et caresser.
Pour les formes, pour le beau, pour le merveilleux, le rare, le fantastique, le haut de gamme, j’aurai le reste de ma vie… Ou bien je ne l’atteindrai jamais. Tant pis ! Faut essayer ! ça coûte rien. Ça coûte du temps, diront certains. Des heures agréables. Des instants d’intimité profonde avec moi-même. Des moment de grâce, uniques et précieux, ou je me confond avec mon moi le plus impénétrable.
Pourquoi s’en priver, finalement ? Pourquoi vouloir passer à coté par vanité ? Parce que je sais que ce sera médiocre et vacillant ! Qu’importe ! Je serai seule à l’heure du bilan. Je serai seule juge à me condamner. Mes proches ne le feront pas ! Par tact, par bienveillance, par gentillesse, ils jugeront la chose formidable ! Pas d’objectivité !
Et, moi ? J’en aurai, de l’objectivité ? Plus que quiconque ! Quand il s’agit de moi, je peux être injuste et cruelle à l’infini. Déjà je doute, alors…
Mais tant pis. J’ai commencé. J’aime pas revenir sur mes décisions. Ce qui est entamé doit être terminé. On ne gaspille pas !
C’est un jeu. Un simple jeu. Certains brodent, d’autres peignent.
Je suis comme une couturière du dimanche, qui un jour décide de se coudre sa première robe.
Je suis comme un peintre amateur, qui un jour décide de réaliser une fresque. Pas une fresque visible aux yeux de tous ! Non ! Une fresque sur les murs de sa pièce intime, pour lui-même et ses plus proches parents.
Par goût du jeu, pour m’amuser, pour prendre du bon temps, pour me divertir…mais aussi parce que ces moments délirants, ou je jubile, ou ma tête se sépare de mon corps, mais ou elle fusionne avec les plus folles ardeurs de mon âme sont des moment intenses, et d’une volupté poussée à l’extrême.
Et concrètement ?
Ce sont des idées qui me viennent un peu au hasard, à la dérive, sous forme de pulsion, à tous moments de la journée (et parfois de la nuit). C’est cette avidité pressente de les consigner dans l'instant. C’est ce travail de fourmis persévérante de les mettre en ordre, de les arranger, de les trier, de les modifier, de les malaxer jusqu’à obtenir la forme désirée… C’est ce plaisir gratuit et coupable à la fois de veiller tard le soir pour goûter à cette jouissance presque interdite.
Et… VRAIMENT concrètement ?
Alors, ça..... ??????????????????????????????