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Val ...
5 septembre 2019

Le sauveur

Charles allait mal depuis la rentrée. Nouvelle école. Son copain qui a déménagé. Il a pleuré chaque matin devant le portail, pour aller en classe. 

« Je n’ai pas d’amis », voilà la réponse qu’il m’a faite. 

Pourtant, ils sont tous les trois dans la même classe, avec mon petit brun et la choupette. 

« Je n’ai pas d’amis! ». 

J’ai interrogé mes deux protégés. Le petit brun m’a dit qu’il avait proposé à Charles de venir jouer avec les siens, de copain. Charles a refusé. Trop brutaux et agités.  

« Je n’ai pas d’amis ». 

La choupette est nouvelle dans l’école. Elle reste pourtant accrochée à Charles à chaque récréation. Ils sont au moins deux. 

« Ça ne compte pas, je n’ai pas d’amis ». 

Hier, je partais faire quelques courses quand Charles m’a tendu son unique billet. Dix euros. Il voulait que je lui achète des « cartes Pokémon ». Un paquet de dix cartes, c’est à peu près le prix, à priori. 

Pourquoi donc? 

Et j’ai compris, après une conversation avec les trois enfants: pour jouer avec les autres, à la récréation, il faut des cartes Pokémon. 

J’ai refusé le principe. Charles vaut mieux que cela. J’ai repensé à Gabriel, au même âge, qui s’accommodait de solitude plutôt que d’adhérer à ces modes bêtes.

Je suis partie faire les courses sans le billet. Ça m’a fait assez mal au cœur. Mais enfin, il faut qu’il comprenne la stupidité du truc!

Voilà ce que je pensais. 

Et puis, lorsque je suis rentrée, Gabriel aussi était rentré du lycée. Charles avait pleuré. Je l’ai vu à ses yeux. J’ai regretté soudain de ne pas avoir cédé, l’espace d’une seconde. Mais son frère l’avait écouté et consolé. Il allait un peu mieux.

Nous sommes passés à autre chose, et pourtant ce malaise restait en moi. Mon fils sans amis à l’école. Oui, mais c’est stupide d’être accepté parce qu’on a tel jeu à la mode. Conflit intérieur. 

Et puis, Gabriel a tout résolu. Il est descendu avec une sacoche qu’il a tendue à son jeune frère. Dedans, il n’y avait pas dix mais cinq-cent cartes Pokémon. 

« Fais-y attention ! Il m’a fallu des années pour rassembler une telle collection ! Ne les échange pas, n’en donne pas! ».

Charles souriait. Son frère, qui est déjà son héros, est devenu un sauveur providentiel. 

Ce matin, armé de ses cinq-cent cartes, il n’a pas pleuré au portail de l’école. 

« Personne n’en n’a autant que moi! », s’est-il exclamé dans un sourire magnifique. 

Tant mieux pour lui, si Gabriel l’a aidé. N’empêche, moi, j’ai du mal avec ça...

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Commentaires
E
incontournables pokemon, liant social précieux chez les petits , ils est chouette le grand frère : confier son trésor c'est difficile
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T
Et je voulais rajouter quel belle complicité entre ces 2 frères, c'est beau à lire.
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T
C'est vieux ces pokemon, il me semble que mes enfants en avaient déjà, à moins que je confonds?
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W
La compet' est décidément partout !
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B
Ainsi des cartes Pokemon t'aident à avoir des amis ;) Tant mieux pour Charles !
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